La gouvernance d’entreprise est le pilier de la performance et de la pérennité. Fort de plus de 20 ans d’expérience comme administrateur, dont la Présidence du Conseil d’Administration de la BRVM, le Dr Parfait Kouassi livre cinq recommandations clés pour renforcer l’efficacité de votre conseil d’administration et éviter les pièges courants. Découvrez comment une meilleure préparation des réunions, une séparation claire entre gouvernance stratégique et exécution, l’autonomie des administrateurs, une vision stratégique affûtée et une collaboration solide avec la Direction Générale peuvent transformer votre gouvernance d’entreprise.
Le rôle d’un administrateur au sein d’une entreprise dépasse largement la simple présence aux réunions. C’est une fonction essentielle à la bonne gouvernance d’entreprise, impliquant des responsabilités juridiques et une exigence de compétences pointues, de disponibilité et d’intégrité. Comprendre les obligations et les limites de ce mandat est crucial.
Au fil de plus de vingt années de pratique, j’ai observé des pièges récurrents qui menacent l’efficacité des conseils. Pour les éviter et pour renforcer la valeur ajoutée des administrateurs, je propose cinq recommandations majeures.
1. Se préparer rigoureusement avant chaque réunion du conseil d’administration
Un administrateur informé est un administrateur utile. Trop souvent, les sujets inscrits à l’ordre du jour sont découverts à la dernière minute, ce qui conduit à des débats superficiels et à des votes non éclairés. La préparation implique:
- La lecture attentive et anticipée de tous les documents envoyés ;
- L’identification des points sensibles, des risques et des zones d’ombre ;
- La formulation de questions précises à poser en séance.
Un administrateur silencieux faute de préparation manque à son devoir de vigilance.
2. Respecter la séparation entre gouvernance et exécution
Le conseil d’administration est l’organe de gouvernance stratégique; la Direction Générale (DG) est responsable de la mise en œuvre opérationnelle. Cette séparation des rôles est fondamentale pour l’équilibre des pouvoirs et la clarté des responsabilités. Les administrateurs doivent donc éviter toute ingérence dans la gestion quotidienne: leur rôle est de contrôler, challenger et orienter, non de diriger à la place de l’exécutif.
3. Préserver l’autonomie, l’indépendance et la responsabilité vis‑à‑vis de l’exécutif
La confiance avec la DG est nécessaire, mais elle ne doit jamais se transformer en complaisance. Un administrateur ne peut être la simple chambre d’enregistrement des décisions de l’exécutif. Il doit:
- Exiger des justifications et des indicateurs fiables;
- Formuler des réserves lorsque cela s’impose;
- Refuser les décisions contraires à l’intérêt social ou aux bonnes pratiques de gouvernance.
Cette posture suppose courage, intégrité et sens de l’intérêt collectif.
4. Renforcer la vision et la posture stratégiques du conseil d’administration
Le conseil d’administration n’est pas un organe d’exécution mais de pilotage. Les administrateurs doivent donc adopter une posture de «superviseurs stratégiques» capables de:
- Anticiper les tendances du marché et les ruptures potentielles;
- Évaluer les risques à moyen et long terme;
- Intégrer les enjeux ESG (économiques, sociaux, environnementaux et de gouvernance);
- Contribuer à l’élaboration d’une vision stratégique cohérente et à son suivi dans le temps.
Un bon administrateur est d’abord un penseur de l’avenir.
5. Travailler de manière collégiale et en complémentarité avec la Direction Générale
Le conseil est un collège: son pouvoir est collectif. Ni le Président du Conseil (PCA) ni le conseil en tant que tel ne constituent la «hiérarchie» du Directeur Général au sens opérationnel du terme. La relation PCA/CA–DG est d’abord une relation de complémentarité et de répartition non chevauchante des compétences. Cela implique :
- Un dialogue régulier, franc et transparent;
- La reconnaissance des rôles de chacun;
- La recherche systématique de la meilleure décision pour l’entreprise, et non d’un rapport de force.
6. Les principaux pièges à éviter pour une gouvernance d’entreprise efficace
- L’insuffisance de préparation qui conduit à des votes passifs ou mal informés;
- L’ingérence dans la gestion opérationnelle qui brouille la frontière gouvernance/exécution;
- La dépendance excessive à la DG qui mine l’esprit critique du conseil;
- L’absence de vision stratégique qui enferme le conseil dans la routine et le court terme;
- La tentation de considérer la DG comme hiérarchiquement inférieure, alors que la logique doit être celle de la complémentarité.

En conclusion
Être administrateur, c’est assumer une mission exigeante au service d’un projet collectif et durable. Cela requiert discipline, indépendance d’esprit et sens stratégique. En appliquant ces cinq recommandations, chaque administrateur peut renforcer la performance globale du conseil, protéger sa responsabilité et, surtout, contribuer à la pérennité et à la croissance de l’entreprise.

Dr Parfait KOUASSI
Administrateur indépendant
Président du Conseil d’Administration de la Bourse Régionale des Valeurs Mobilières (BRVM)
Certifié Sciences Po
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Voir également : Conseils d’Administration Créateurs de Valeur | Conseils d’Administration Performants.